L’Europe aurait dû travailler de façon unie

mar 11, 2020 Categorie: Territorio ,Sul territorio
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ZampaCoronavirus. En Italie, « le confinement est la mesure la plus efficace », explique Sandra Zampa

Pour Sandra Zampa, vice-ministre italienne de la santé, il y a eu des erreurs initiales dans la gestion de la crise, mais l’Italie n’est pas une exception. Là où il y a confinement, comme en Chine ou à Codogno, en Lombardie, les cas diminuent. « Si nous le faisons tous ensemble, on sortira plus vite du danger ».

Interview de Laurent Marchand avec Sandra Zampa sur Ouest-France du 11 mars 2020

Dans un entretien à Ouest-France , la vice-ministre italienne de la Santé, Sandra Zampa, explique les raisons qui ont amené l’Italie à adopter des mesures inédites en procédant au confinement de tout le pays jusqu’au 3 avril.

Pourquoi l’Italie a opté pour des mesures si radicales ?

La Chine nous enseigne que le confinement est la mesure la plus efficace. Il faut éviter à tout prix la contagion entre les personnes. Ce virus est dangereux parce qu’il est très contagieux, et se diffuse à une vitesse extraordinaire. De façon exponentielle. Il faut absolument stopper cette spirale.

Quelles informations avez-vous sur la première zone qui a été confinée le 21 février, à Codogno, en Lombardie ?

Le 21 février, nous avons isolé Codogno et onze communes de la région de Lodi où il y a eu une flambée de cas positifs. Avec une fermeture totale. Et bien depuis quelques jours, les chiffres nous disent que cela fonctionne. Les cas de contagion sont en très nette régression. Comme à Wuhan. Cela nous dit que c’est la voie à suivre. Sinon le virus devient comme un fleuve en crue et les digues risquent de lâcher. En l’occurrence, le point de fragilité, ce sont les services de thérapie intensive.

Le système italien est-il en mesure de faire face à une telle vague ?

Nous avons actuellement 5 000 places en thérapie intensive plus 5 000 en maladies infectieuses, mais c’est insuffisant. Le gouvernement a d’ores et déjà décidé d’augmenter cette capacité de 50 % dans l’immédiat, et de 100 % pour les soins semi-intensifs, permettant de traiter l’oxygénation des patients avec des moyens moins coûteux.

Comment expliquez-vous l’ampleur des décès en Italie ?

Le grand nombre de décès est dû, malheureusement, à l’âge moyen de nos patients. L’Italie a une population très âgée, nous sommes leader mondial avec les Japonais sur le vieillissement, et c’est un point d’extrême fragilité face à ce virus. Plus de 30 % des cas mortels ont plus de 80 ans.

Les Européens ont-ils sous-évalué le danger ?

Je le dis en Européenne convaincue, l’Europe aurait dû travailler aussitôt de façon unie. Quand je dis aussitôt, je veux dire lorsque les images nous sont arrivées de Chine, de Wuhan. Elles devaient suffire pour comprendre que nous devions, avant même l’arrivée du virus, élaborer un plan de résistance. Mme von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, aurait dû convoquer immédiatement les responsables de la santé, même si bien sûr c’est une matière de compétence nationale.

C’est ce que dit Bruxelles, c’est la prérogative des États…

Mais là, on est au-delà des politiques publiques de santé ordinaire, on est face à une urgence internationale. Et un plan était nécessaire, pour répertorier toutes les mesures utiles pour ralentir la diffusion du virus, qui était déjà probablement en cours. Par exemple, sur les échanges aériens avec la Chine on aurait été plus efficaces ensemble. Et sur la comptabilité des moyens à disposition dans chaque pays pour faire face. Il y a les respirateurs artificiels, les masques, les tests, mais aussi les médecins, les spécialistes, l’ensemble des moyens. De même pour le protocole de soin, ce qui permettrait de savoir rapidement quel cocktail de médicaments est plus efficace que d’autres. Toutes ces informations étaient nécessaires et le sont toujours. C’est une énorme occasion manquée.

La voie italienne restera une exception ou l’Italie est seulement en avance de phase ?

Je pense que les autres pays devront, inévitablement, prendre des mesures de suspension de la vie normale. Si nous le faisons tous ensemble, on sortira plus vite du danger. Car le risque que nous courrons, c’est que la contagion continue même lorsque la vague principale est passée, comme une épée de Damoclès sur la tête des citoyens européens, d’un pays à l’autre. Il est évident que plus cela dure et plus c’est lourd de conséquences pour l’économie. Il vaut mieux tout arrêter pendant trois semaines et faire en sorte que les gens restent chez eux le plus possible, que de continuer comme cela. Les chiffres en Allemagne montrent une progression identique à la situation italienne, même s’il y a moins de décès.

Quelles erreurs ont été commises dans la gestion de la crise ?

Il y a eu beaucoup d’erreurs dans la communication et dans la répartition des compétences entre l’État et les régions en Italie. Devoir discuter les mesures à prendre avec toutes les régions a provoqué des retards, et surtout des fuites d’information sur les mesures en cours qui ne devaient pas avoir lieu. L’exemple emblématique, c’est ce que nous avons vécu samedi dernier. L’hypothèse de fermeture de la Lombardie a circulé avant son annonce officielle et cela a provoqué la fuite de Milan de plus de 20 000 personnes de façon désordonnée, en s’exposant à des risques de contagion et en mettant en danger la santé des lieux de destination.

Se laver les mains est un message bien reçu, mais la distance entre les personnes passe plus mal dans l’opinion. Pourquoi ?

C’est normal. On a l’impression de vivre dans un film de science-fiction, dans un climat irréel. Ce virus est vécu comme quelque chose de lointain. Je crois que nous nous sommes bercés d’illusion en pensant que ce qui survenait en Chine n’allait pas nous concerner. C’est une leçon. Tout ce qui se passe au bout du monde nous concerne, et c’est pour cela que l’Europe se doit d’être préparée sur ces sujets.

Les prisons italiennes sont en ébullition, il y a eu huit morts à Modène. Elles sont hors de contrôle ?

Oui, il était de notre devoir d’informer les détenus dans les prisons de ce qui était en cours, d’autant plus que nous avons de grands scientifiques pour le faire. Pour échanger, poser des questions. Lorsque vous êtes enfermés en prison, en situation de surpopulation dans les cellules comme c’est le cas, vous avez peur. Le virus est une menace qui vous regarde et vous ne pouvez même pas fuir. Cela crée un climat de panique. Il faut tout faire pour favoriser les échanges avec les familles, et avec le personnel médical en mesure d’expliquer la situation.

L’Autriche annonce qu’elle ferme le col du Brenner ?

Si la situation n’était pas si grave, je dirais que cela fait sourire. Comme si l’Autriche pouvait s’immuniser en fermant un col. L’Autriche feint probablement de ne pas savoir que le virus est déjà chez eux.

Le ministre français de la Santé annonce que dorénavant ne seront communiqués que les cas graves et les décès, et non l’ensemble des cas positifs. Vous procédez de la même manière ?

Non, nous avons opté pour la diffusion du maximum d’informations auprès des Italiens. C’est peut-être anxiogène, mais je pense que les personnes doivent aussi comprendre si on veut, ensemble, faire face au virus. C’est la conscience du danger qu’il faut diffuser.

 

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abc last mar 11, 2020 Categorie: Territorio ,Sul territorio
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